Depuis les élections législatives de 2022, l’extrême gauche a vu sa définition s’élargir à l’ensemble des partis de gauche.
C’est marrant parce que dans sa solennelle intervention pour faire barrage au Rassemblement National le soir du premier tour, Emmanuel Macron allait interpeller « Jean Luc » et tous les autres candidats de gauche comme faisant partie intégrante du front républicain.
Pourtant, quelques mois plus tard, à l’occasion du second tour des législatives, sur 62 duels NUPES/RN, la Macronie affirmera 55 fois ne pas vouloir prendre partie entre les deux extrêmes. Comme je l’avais démontré lors de mon dernier article, les mots n’ont plus aucun sens avec ces gens là, nous sommes dans une réalité virtuelle ou on change constamment les éléments de langage, au grès du vent, sans jamais se soucier d’une cohérence d’ensemble.
La réalité aussi, c’est que pour les financeurs de ce groupe d’influence au service des lobbyes qu’est la Macronie, la seule chose grave qui pourrait arriver c’est la victoire d’une gauche qui mènerait une politique de gauche. Une victoire de l’extrême droite les gênerait moins, on a pu le voir à travers le soutien sans réserve des chaînes de Bolloré à la candidature Zemmour.
Mais le vrai projet serait pour eux un débat droite gauche entre une droite Macroniste et une gauche Hollandiste, c’est à dire un projet identique sur le plan économique et social, plus assumé à droite et enrobé derrière des discours généreux et quelques mesures sociétales n’engageant jamais les intérêts des grands lobbyes. Le rêve secret de ces gens là pour 2027 serait un second tour Edouard Philippe contre Bernard Cazeneuve, c’est à dire un même projet enrobé d’un vernis différent.
D’ailleurs il est amusant de constater que la droite du PS et la Macronie utilisent le même sobriquet vis a vis de la gauche sociale : « extrême gauche »
Pour eux, la réduction du temps de travail, la création d’une aide sociale envers les plus défavorisés comme la CMU, ou le traitement social du chômage à travers des contrats aidés comme les emplois jeunes seraient un programme d’extrême gauche ! Cette dérive idéologique me faisait avoir une réflexion amusante : pour ces gens là, le Lionel Jospin de 1997 serait donc considéré comme un dangereux extrêmiste…. Pour les libéraux, les mots n’ont vraiment plus aucun sens.
La posture sociale de l’extrême-droite
Ne nous y trompons pas l’extrême-droite n’a jamais défendu l’intérêt des plus pauvres, elle a toujours cette technique de diviser les pauvres entre ceux qui sont d’origine française et ceux qui sont d’origine étrangère.
D’ou la stratégie de Zemmour de gonfler le coût de l’immigration et de la fraude sociale tout en minimisant celui de la fraude fiscale, nous rappelant au passage que dans extrême-droite, il y a surtout droite.
On est dans un système ou des économistes libéraux pleurent sur le niveau élevé selon eux de la tranche maximale de l’impôt sur le revenu en France, tout en oubliant de préciser qu’avec la multiplication des niches fiscales et les techniques d’optimisation fiscale, on se retrouve dans un systéme ou la plupart des 370 ménages les plus riches de France, ont au final un taux d’imposition global qui peine à dépasser les 2 %.
A coté de ça on culpabilise les chômeurs, les bénéficiaires du RSA comme des privilégiés qui ne payent pas d’impôts en oubliant qu’avec les impôts indirects (TVA, Taxe sur les produits pétroliers) , les bénéficiaires des minimas sociaux payent proportionnellement beaucoup plus de taxes ou impôts que les millionnaires.
C’est là ou l’extrême-droite cesse d’être crédible. Car derrière des propositions sociales comme la retraite à 60 ans, ils prônent aussi une baisse des impôts… Comment financer à la fois une hausse des dépenses sociales et une baisse des recettes fiscales, c’est un grand mystère !
La question cruciale est plutôt : si l’extrême droite arrive au pouvoir quelles promesses vont il tenir ? Celles aux pauvres ou celles aux riches ? Une piste toutefois, dans extrême-droite, il y a droite…
L’instrumentalisation de la violence
Emmanuel Macron a l’art de la provocation, son attitude exaspère les gens qui ne se sentent pas écoutés ; Pourtant après chaque dérapage, les violences qui en sont une conséquence directe sont présentées comme un passif de la gauche.
La gauche a l’habitude de cette question : « condamnez vous les violences ? ». Ce qui édifiant, c’est que répondre à cette question ne suffit pas, la moindre justification est condamnée, présentée comme une acceptation de la violence.
C’est un peu comme si cet été on avait été consultés avec cette question : « condamnez vous les incendies ? » puis condamnés parce qu’on aurait dit : on ne condamne pas seulement les incendies, on condamne aussi les pyromanes qui les allument.
Toute opposition de gauche est taxée d’extrême gauche, on mets donc dans le même panier la gauche et l’extrême droite au nom de la sacro-sainte condamnation de tous les extrêmes.
Mais ce jeu est dangereux, pcq la prochaine fois , si un macroniste se retrouve au second tour des présidentielles face à un candidat RN, tout le monde se souviendra de cette période et il n’y aura pas de front républicain. Mais Emmanuel Macron est il républicain ?
De plus en plus d’intellectuels s’inquiètent de l’évolution de la France.
Jean François Bayart professeur à l’IHEID à Genève pose un diagnostic inquiétant :
« Son exercice du pouvoir est celui d’un enfant immature, narcissique, arrogant, sourd à autrui, plutôt incompétent, notamment sur le plan diplomatique, dont les caprices ont force de loi au mépris de la Loi ou des réalités internationales.
Ce pourrait être drôle si ce n’était pas dangereux. L’interdiction de l’ «usage de dispositifs sonores portatifs» pour éviter les casserolades des opposants, le bouclage policier des lieux où se rend le chef de l’Etat, le lancement de campagnes de rectification idéologique contre le «wokisme», la «théorie du genre», l’ «islamo-gauchisme», l’ «écoterrorisme» ou l’«ultra-gauche» sont autant de petits indices, parmi beaucoup d’autres, qui ne trompent pas le spécialiste des régimes autoritaires que je suis. La France est bel et bien en train de rejoindre le camp des démocraties «illibérales». J’aurais tendance à dire aussi que la concentration des médias sur quelques grands groupes, favorisent le rabâchage idéologique par des « pseudos journalistes » des grands concepts libéraux mais aussi permettent la caricature de tous les opposants à cette pensée unique. Il restait dans les grands médias quelques îlots de liberté, notamment par le biais de l’humour, grâce au service public sur France Inter ou l’émission « C’est encore nous » voit son audience augmenter chaque année. Mais cet humour irrévérencieux, c’est encore trop pour ce pouvoir et une direction aux ordres qui va l’an prochain rendre hebdomadaire son émission la plus écoutée, c’est à dire aller contre l’intérêt même de leur radio, juste pour complaire aux desideratas du pouvoir actuel. Certainement une étape avant la suppression de ce que le Macronisme voit comme une verrue dans un paysage audiovisuel mainstream bien aligné, aux ordres du pouvoir économique. Quand un pouvoir ne supporte même plus la satire, c’est aussi le signe d’une évolution inquiétante. Alors oui, la France n’est ni la Corée du Nord ni l’Iran, mais ce pays évolue incontestablement ces derniers temps vers un affaiblissement démocratique. N’attendons pas qu’il soit trop tard pour le dénoncer.
Le seul danger, c’est l’extrême droite
La réalité est que l’extrême gauche n’est pas représentée à l’Assemblée Nationale en France alors que le Rassemblement National est le deuxième parti le plus représenté.
La réalité est que les débats houleux à l’Assemblée Nationale ont toujours existé en France, qu’il n’y a pas d’évolution inquiétante à ce sujet. Les historiens pourraient même nous rappeler des périodes bien plus houleuses. Que même si on peut regretter l’attitude potache et caricaturale de certains à gauche, il reste évident que la NUPES, simple alliance électorale entre 4 partis de gauche ne peut en aucun cas être considérée comme un extrême.
Par contre la menace d’extrême droite, malgré l’attitude policée des députés RN est une réalité. Les services de renseignement français ont déjà identifié la menace terroriste d’extrême droite comme pratiquement aussi importante que la menace islamiste.
Le terrorisme d’extrême gauche est de nature très différente. Que ça soit par le volume de la menace ou par le type d’actions envisagées, il est beaucoup moins menaçant pour les personnes. Le site Statista le définit de la manière suivante : « Ces dernières années cependant, le terrorisme d’extrême gauche a évolué et ce sont plutôt des mouvements anarchistes qui se sont attachés à réhabiliter l’action directe, mais à la différence des anarchistes du début du XXe, siècle, ils se concentrent surtout sur des attaques symboliques et matérielles ». Les black bocks sont quant à eux, surtout une menace pour les manifestants et les causes qu’ils défendent, souvent de simples pillards, idiots utiles du gouvernement pour discréditer un mouvement social légitime et pacifique. On peut d’ailleurs se poser la question de la véritable volonté gouvernementale de les arrêter, notamment quand on voit Linda KEBAB, policière, syndicaliste SGP FO affirmer qu’on pourrait les arrêter mais qu’on ne leur demande pas.
Quand des militants activistes écologistes occupent les bassines à Sainte Soline dans les Deux Sévres, le gouvernement organise une véritable bataille rangée qui sera d’une violence inouïe de part et d’autre ce qui permettra à nouveau de gloser sur le mythe du danger d’extrême gauche, tout en évitant l’important débat de fond que posent ces bassines. Les politiques qui prendront position dans ce très difficile débat écologique, contre ces bassines, seront qualifiés d’extrémistes, ceux qui remettront en question la stratégie d’affrontement du gouvernement idem.
La stratégie gouvernementale est simple : ils savent que la gauche peut revenir au pouvoir alors que l’extrême-gauche n’aura aucune chance. Alors ils font ce qu’ils font toujours, des campagnes de communication ou les mots n’ont plus aucun sens. Ainsi ils transforment l’opposition de gauche en extrême gauche pour pouvoir se présenter comme un rempart entre les deux extrêmes. Pour la Macronie, tous ceux qui ne sont pas avec eux sont des extrémistes ! Pratique comme concept !
Cette stratégie a toutefois une grosse faille, c’est d’affaiblir la vigilance que chaque citoyen devrait avoir contre la menace d’extrême droite en la banalisant. Les manifestations de nervis d’extrême droite, masqués et menaçants, considérés par certaines préfectures comme moins dangereux que des manieurs de casseroles montrent une prise de confiance de ces groupuscules et leurs certitudes sur l’avenir. Ces certitudes sont malheureusement justifiées, l’extrême-droite aura de vraies chances de prise du pouvoir dans 4 ans. Et tous ces macronistes qui auront joué à ce jeu dangereux de renvoyer dos à dos gauche et extrême droite en seront les premiers responsables.