Un triste constat : 5 années perdues par la gauche
Le spectacle désolant d’une gauche éclatée se présentant dans un rôle de figuration lors des prochaines élections présidentielles a créé une vague de mécontentement chez certains électeurs de gauche qui ont un moment fantasmé sur un rassemblement qui permettrait à notre camp de relever la tête.
Mais l’union est-elle la solution miracle à la situation actuelle ? Toutes les candidatures de gauche réunies peinent à atteindre les 25%, 34 % des électeurs de gauche peuvent envisager de voter Macron en avril alors que le président actuel est certainement sur le plan économique et social le président le plus à droite de la 5ème république.
Après 5 années de Macronisme, on sait que le ruissellement, crédo libéral par excellence, ne fonctionne pas. Personne n’avait autant développé en France les théories économiques de Friedmann qu’Emmanuel Macron.
Et cette théorisation du clientélisme aura eu en France exactement les mêmes effets que dans tous les endroits du monde ou cela a été imposé :
Une explosion des inégalités, avec un enrichissement sans précédent des 1% les plus riches et un nombre toujours plus important de personnes en dessous du seuil de pauvreté.
Comment expliquer une telle perte de sens qui fasse que des électeurs se réclamant de gauche puissent soutenir un tel candidat ?
Le calamiteux quinquennat Hollande
Le quinquennat Hollande n’aura pas été plus catastrophique qu’un mandat de droite lambda mais il aura été un véritable renoncement à la volonté d’être une alternance à la droite sur le plan économique et social. Cette nouvelle gauche se prétendant moderne ne définissant plus sa différence avec la droite qu’à travers des sujets sociétaux.
Ainsi, le démantèlement de notre code du travail aura commencé sous Hollande qui aura ainsi brisé un tabou auquel la droite n’osait pas s’attaquer, Emmanuel Macron, alors jeune ministre de l’économie du gouvernement Valls, s’empressant d’enfoncer le clou dès son accession à la présidence.
Le fait de sortir l’économique et le social du clivage droite/gauche en inventant le concept fumeux de social-libéralisme aura complètement dérouté l’électeur de gauche. Manuel Valls rajoutera à la confusion en parlant de 2 gauches irréconciliables alors que lui-même était de fait sorti du champ de la gauche depuis longtemps. Le clientélisme ne peut pas être de gauche, c’est même un marqueur de la droite.
Après la victoire aux primaires de Hamon, ceux qui auront mis leurs convictions de gauche de côté pour cautionner la dérive droitière du quinquennat Hollande crieront à la trahison des frondeurs et se précipiteront malgré le règlement des primaires pour soutenir plus ou moins ouvertement Emmanuel Macron, un candidat de droite avec un programme économique ultra libéral, plongeant les électeurs de gauche dans une totale confusion.
Beaucoup de ces personnages politiques passés à droite mais se prétendant toujours de gauche étant également des élus locaux, de nombreux électeurs se sont retrouvés en pleine crise de valeurs, pris entre leur attachement à leur élu local et leurs convictions de départ.
2017-2022 : Le combat mortifère des hégémonistes
Après les présidentielles, la gauche s’est retrouvée prise en étau entre 2 partis prétendant à un rôle hégémonique à gauche : le PS fort de son statut dominant des 40 dernières années et de son implantation d’élus locaux et la France Insoumise forte de sa dynamique présidentielle.
Le déclin du Parti Socialiste
Pour le PS, qui verra suite au désastre de 2017, son statut passer en 5 ans de parti vainqueur à parti à 6%, 3 options étaient possibles :
Une rupture avec une prise de distance claire par rapport au quinquennat Hollande et à tous ceux qui continuaient à défendre son bilan, avec certainement l’inconvénient d’une scission à court terme et l’avantage à moyen terme de redevenir crédible pour le reste de la gauche. C’était selon moi la seule chance pour ce parti de rebondir.
Une autre option était de ne pas trancher et de faire du PS une réalité totalement complexe avec une véritable cohabitation entre des hommes et des femmes de gauche et d’autres ayant quitté le champ de la gauche depuis longtemps. Cette solution du court terme ne pouvait que rendre ce parti inopérant et notamment totalement incapable de produire un candidat et un programme satisfaisant tout le monde pour une élection nationale. L’autre option était de devenir un parti de gauche à l’américaine, ne proposant pas d’alternative sur le plan économique à la droite, de défendre bec et ongles le bilan de François Hollande, avec pour seule ambition de gouverner avec le centre.
Lors des élections pour le poste de 1er secrétaire en 2018, 3 candidats représentaient ces 3 options :
Emmanuel Maurel était le candidat de la rupture, Olivier Faure le candidat de la chèvre et du chou, et Stéphane Le Foll le candidat d’un virage à droite assumé.
La victoire d’Olivier Faure aura été un non choix et on peut aujourd’hui en mesurer les catastrophiques effets.
L’occasion manquée par la France Insoumise
Forte de son excellent score au 1er tour en 2017 à près de 20%, la France Insoumise a fait le pari de réussir seule, démarrant par une rupture avec son partenaire le PC, puis insistant sur un clivage peuple/élites plus que sur un clivage droite/gauche. Malgré un programme économique et social keynesien de rupture, intéressant et ambitieux, une vision moderne de l’écologie dont ce mouvement s’est emparé depuis sa création, la FI a pris des positions sur le plan sociétal notamment sur un sujet essentiel comme la laïcité qui ont gêné pas mal de partenaires et n’est pas parvenu à embarquer le reste de la gauche derrière lui, même si la candidature de Jean Luc Melenchon reste à ce jour la seule à pouvoir encore se mêler à la course pour une participation au second tour contre les multiples candidats de droite et d’extrême droite. Mais cette stratégie semple plus faite pour prendre le leadership de la gauche que pour gagner l’élection présidentielle et en ce qui me concerne, je le regrette vraiment car il est temps que la France bénéficie d’une politique prenant en compte les aspects environnementaux et sociaux.
Une fédération républicaine et sociale ?
Je pense que l’union de la gauche se fera au sein d’une structure qui reste à créer, qui devra se faire sur la construction d’une véritable plateforme commune et ceci dès 2022 pour être opérationnels en 2027. L’union de la gauche c’est un travail de fond, ça ne peut pas s’improviser sur une base programmatique qui n’a été négociée avec personne comme la pathétique primaire populaire qui n’a été ressuscitée en janvier que pour lancer la candidature de Taubira et abattre celle d’Hidalgo voire celle de Jadot. Il faudra se réunir autour d’un programme économique et social de gauche, qui prendra en compte de manière urgente et sérieuse la question environnementale en s’appuyant sur des principes républicains et démocratiques progressistes. Et tous ceux qui se reconnaitront dans ces valeurs seront les bienvenus, sans aucun ostracisme. Sinon nous devrons nous habituer à voir tous les 5 ans la droite et l’extrême droite se disputer le pouvoir..